Actualité - Cérémonies - Commémorations

2015 Février Pierre FAVREAU membre du Sous-Marin CASABIANCA 1935 1952

Article publié le samedi 21 fév. 2015

        

Le 27 août 2014, à Cannes ont eu lieu les obsèques de Pierre FAVREAU, grande figure de la mémoire des combattants de la Seconde Guerre mondiale qui s'est éteint le samedi 23 août dans sa résidence du Canet à l'âge de 92 ans

Pierre FAVREAU était le dernier survivant de l'équipage du sous-marin Casabianca, sur lequel il était affecté au poste d'opérateur radio. Le 27 novembre 1942, le Casabianca ne s’était pas sabordé mais avait pris la fuite pour rejoindre les Alliés à Alger. Quelques mois plus tard, le Casabianca avait pris part à la libération de la Corse.

Homme libre, Pierre FAVREAU faisait l’unanimité pour ses qualités humaines et intellectuelles. Son courage, son humanité et son action lui ont valu les plus grands honneurs, ainsi que l’admiration et l’estime de ses compagnons sous-mariniers.

Sources : © Marine nationale
Droits : © Marine nationale

 

Le 8 février 2015, au large du Cannier, l'équipage rouge du Sous-marin Nucléaire d'Attaque CASABIANCA, sous les ordres du Capitaine de Corvette Vincent VACQUE a procédé à l'immersion des cendres de Pierre FAVREAU, une cérémonie sobre et émouvante

 

Plusieurs reportages photographiques relatent cet évènement dont nous nous faisons le relai

Photos prises par le photographe officiel de la FOSIT (sélection des 12 plus belles, reprises en partie par Cols bleus)

 

 

Photos prises par le photographe officiel de la FOSIT (toutes les photos)

 

 

 

 

Photos prises depuis la passerelle du Casabianca :

 

 

Photos prises par les membres de l’AGASM depuis la vedette SNSM

 

Le lien vers le film réalisé depuis la vedette SNSM :

        Etait présente à bord de la vedette de la SNSM, la section Pégase de l'AGASM (de Nice) par son Président, son porte drapeau et son trésorier, cette section était l'instigatrice de la cérémonie car Pierre FAVREAU était membre de la section Pégase. C’est bien entendu avec l’accord du Chef d'Etat Major de la Marine, Amiral Bernard Rogel, que cette cérémonie a pu avoir lieu.  

Etait également présente, la section Rubis de l'AGASM (de TOULON et du VAR) par son secrétaire accompagné de son épouse, Mme Vve Louis Gicquel, dont son mari Louis, avait fait toute la guerre sur le Casabianca, et deux membres de la vedette de la SNSM dont le patron qui sont également sous mariniers et membres de la section Rubis sans oublier Francis, le photographe de la section Rubis

 

Pour mémoire :

 

Sélection de photos du Casabianca de l’époque, origine SHD Toulon :

 

Sélection de photos de Pierre Favreau, jeune et moins jeune

 

La communauté des Marins et plus particulièrement des Sous-Mariniers, remercient le Capitaine de Corvette Vincent Vacqué, Commandant le Sous-marin Nuclaire d'Attaque Casabianca, équipage rouge, pour nous avoir transmis les liens liès à cet Hommage.

 


Histoire

 

   

Casabianca un sous marin francais

                      

Etablissement public administratif, sous la tutelle du ministre de la Défense, l’ECPAD est un centre d’archives et de production audiovisuelle de premier plan, bénéficiant du savoir-faire de ses 265 professionnels, militaires et civils, et reconnu par ses partenaires de la Défense et les professionnels de l’image.

 

          Ici sur le site de nos amis de la section Rubis de l'AGASM

le Rapport d’opération du Capitaine de corvette Jean L’HERMINIER

 

 

 

Le récit de Charles BERNARD, membre de la section Doris de l'AGASM

 

Aussi

 

 


 

 

 

Par Yves SANCHE

Commandeur des Palmes Académiques

Officier de Mérite Maritime

Historien et Conférencier local

 

Evasion des sous-marins basés au Mourillon lors de

L’OPERATION LILA VENDREDI 27 NOVEMBRE 1942

Extraits d’une conférence présentée en son temps et se rapportant à ces submersibles

TOULON LE JEUDI 26 NOVEMBRE 1942

Un témoin, et non des moindres, le général REVERS, arrivant ce jour là à TOULON, est surpris par le climat d’euphorie et de quiétude qui règne dans cet étrange camp retranché, c’est le moins que l’on puisse dire. Il constate par exemple que ses entrées Est, c'est-à-dire du côté de la VALETTE, à 6km du centre ville, comme celles du côté Ouest,  vers OLLIOULES, à 8km , ne sont gardées chacune que par un poste de gendarmerie composé de cinq à six gendarmes ( ! ) qui, au mépris de toutes les règles de sécurités les plus sommaires, ne sont même pas doublées ……. !  on croit rêver….. ! et ce, de surcroît, sur un axe routier principal, c'est-à-dire que si l’ennemi décide de prendre un réseau routier secondaire, et il y en a plusieurs, du reste tous en parfait état, il n’y aura personne pour le signaler. Voilà quelles étaient les dispositions prescrites par l’amiral MARQUIS, Préfet Maritime, lui permettant de surveiller (sic) les itinéraires que les allemands peuvent utiliser, s’ils décident un jour, ou même une nuit, d’envahir le camp retranché. 6 gendarmes en tout.

Par ailleurs, au Fort-Lamalgue, au Mourillon, où avait été repliée l’Ecole Navale, en son temps, de BREST à TOULON, les midships avaient été transformés en groupes de combat, pour combattre qui ? ils n’en savaient rien eux-mêmes, alors qu’ils piaffaient d’impatience, espérant et souhaitant que la flotte appareille et les évacuent vers l’Afrique du Nord, afin de pouvoir prendre part au combat leur permettant d’en découdre avec les allemands. D’autre part, et ce fait n’est que très peu connu des milieux de la Marine Nationale, sur les panneaux d’affichage de l’Ecole Navale, était apposée la note suivante, qui vaut son pesant d’aberration, de stupidité : LES MORTS DE MERS-EL-KEBIR ET DE CASABLANCA,VEILLENT AUX PORTES D’OLLIOULE ET DE LA VALETTE…. !  Les midships avaient conscience du ridicule de cette annonce précisant qu’il fallait compter sur le rappel de la mémoire des morts de MERS-EL-KEBIR Et CASABLANCA, (Opération TORCH) dont les allemands n’avaient vraiment que faire pour en tenir compte au point, par respect pour eux, de ne pas s’attaquer à la flotte Française, naïveté vraiment qui dépasse l’imagination ! ce renseignement manuscrit, m’a été fourni par mon cousin, avec lequel j’étais très proche, le vice-amiral Maurice.  SABATIER, qui précisément à ce moment là, était midship à l’Ecole Navale.

Je suis en possession d’une correspondance manuscrite de sa part à ce sujet que je tiens à disposition de ceux qui souhaiteraient le compulser.

Pour ma part, j’étais ce jour-là, jeudi 26 novembre, dans le cadre de mon apprentissage, affecté à l’atelier de chaudronnerie, lequel se trouvait à l’arsenal du  Mourillon. Comme bâtiments, seuls, les 9  sous-marins suivants s’y trouvaient positionnés :  REDOUTABLE, DIAMANT, HENRI POINCARE, PASCAL, IRIS, GLORIEUX, VENUS, CASABIANCA, MARSOUIN. Ils se trouvaient accostés à notre proximité immédiate. Les apprentis de l’arsenal étaient assimilés aux mêmes traditions qui font la valeur de notre Marine Nationale à savoir : matin et soir : Salut aux Couleurs.

Ce que je vais dire, est formellement AUTHENTIQUE…. !  gravé à tout jamais dans ma mémoire ! il y a des moments dans l’existence, où nos pauvres vies sont dépassées par les faits historiques qui marquent notre MEMOIRE. Ce soir là du 26, avant que ne débute la cérémonie qui consistait à amener les couleurs, nos moniteurs, éducateurs  nous a dit ceci, avec une grande émotion, et des sanglots dans la voix :                                                                                                                                                                                                                                                                   

J’AI QUELQUE CHOSE DE GRAVE A VOUS DIRE : CE SOIR, C’EST NOTRE DERNIERE CEREMONIE DE SALUT AUX COULEURS ! DEMAIN MATIN, NOUS NE POURRONS PLUS HISSER NOTRE PAVILLON TRICOLORE, CAR LES ALLEMANDS  SERONT LA. ILS VONT ENTRER A TOULON DANS LA NUIT… !

émus à notre tour, oui, c’est vrai, c’est bien vrai, nous avons eu les larmes aux yeux. Ce n’était pas une surprise puisque dès le début de l’après-midi, on nous avait annoncé de fortes concentrations de blindés Allemands stationnant sur les bas-côtés des routes à la limite du camp retranché.

A bord du sous-marin CASABIANCA, précisément basé au Mourillon, comme déjà indiqué, à proximité de notre atelier, était embarqué Charles BERNARD, alors âgé de 20 ans, et quartier-maître, mécanicien, (membre de la section Doris de l'AGASM des Sous-Mariniers de Flandres-Artois Picardie, aujourd’hui décédé) et qui demeurait à BRAY-DUNES, rue Jean DELVALLEZ, dans l’ancienne villa du Commandant DEWULF, dont il était propriétaire et avec qui naturellement je m’étais empressé de lier connaissance, dans le courant des années 90, et témoin incontestable de ces évènements, m’a confirmé que, dans le courant de l’après-midi de ce même jour, le Commandant du sous-marin, capitaine de frégate L’HERMINIER, mis au courant de la situation, à savoir le coup de force Allemand prévu pour la nuit prochaine, avait prévenu son équipage qu’il avait l’intention d’appareiller dès leur arrivée, afin de rejoindre l’Afrique du Nord, mais de ne se saborder en aucun cas. Son équipage était composé de 84 hommes dont cinq officiers. Précisant que son appareillage ne pourrait que s’effectuer dans des conditions difficiles, dangereuses, il les prévint donc, rajoutant que pour ces raisons, il ne partirait qu’avec des volontaires. Il rajouta qu’il ne tiendrait pas rigueur à ceux qui, pour des raisons familiales ou autres, choisiraient de rester à TOULON. C’est ainsi que le moment venu, le submersible n’a appareillé qu’avec 35 hommes seulement ! donc le Commandant L’HERMINIER a alors accordé une permission de sortie de deux heures, de 19h. à 21h. , afin que les volontaires puissent se rendre à terre pour des ultimes raisons personnelles. C’est ce qu’a fait Charles BERNARD, m’a-t-il dit, et avant de rejoindre le bord, avec quelques camarades, nous sommes allés prendre le dernier verre au bar qui se trouvait juste en face la porte de l’arsenal du Mourillon, Chez Pierrot .  Et là , stupéfaction…. ! même Pierrot, le patron du bar était au courant, puisqu’il leur a dit : les gars, ce soir, c’est moi qui vous offre à boire, car les allemands vont occuper TOULON dans la nuit ! et c’est ainsi que Pierrot leur offrit le Champagne.  Autrement dit, tout le monde était au courant , du moins à la base, de l’imminence du coup de force allemand, tout le monde SAUF : VICHY, le Fort Lamalgue, La Préfecture Maritime,  l’amiral de LABORDE Commandant des forces de haute mer, le contre-amiral DORNON, Major Général, Patron de l’arsenal de Toulon et j’en passe..... !       Je continue tant d’années après à me poser la question : Comment cela se fait-il ? Je n’ai jamais eu de réponse... ! Alors la réponse, je me la suis faite moi-même : Ils étaient au courant et ils le savaient. A qui pourra-t’on faire croire le contraire... ?   

Du reste, il est bon de rappeler que l’Amiral de LABORDE, qui demeurait à Tamaris, entre La Seyne et Les Sablettes, était arrivé avec ses bagages à bord du STRASBOURG, Navire Amiral, ce jeudi à..... 22 h 00...... !   

Bien que très jeune à ce moment là, ( 15 ans ) et dans les jours qui précédèrent la tragédie qui allait se dérouler, il m’est arrivé d’apercevoir plusieurs fois un motard allemand casqué, mais non armé ( !) circuler dans les rues de Toulon et s’arrêter sur les bords du quai Cronstrad simplement pour observer ce qui se passait dans la rade. Je n’étais pas dupe ni naïf, je voyais bien que ces motards isolés venaient en éclaireurs, n’hésitant pas à rouler à allure lente, et passer sans s’arrêter devant la Porte Principale de l’Arsenal gardée par les fusiliers-marins, A noter qu’a l’intérieur de l’Arsenal, et à une centaine de mètres de chaque porte, je l’ai vu, de mes yeux vu, des nids de mitrailleuses avaient été installés, pointés en direction de la porte.  

                                                                                           

L’ARSENAL EST DESORMAIS DIRECTEMENT MENACE

TOULON LE VENDREDI 27 NOVEMBRE 1942

 

04 H 30 le Fort Lamalgue tenu par le Préfet Maritime est pris par les SS de la Division DAS REICH, commandée par l’Obergruppenfürer Pzul HAUSSER est occupé, ses blindés étant arrivés par La Valette, Brunet et Saint-Jean-du-Var, alors que l’autre Panzer au départ d’Ollioule, s’était dirigée vers Saint-Mandrier pour boucler la rade.

Il est 5h15. La deuxième vague Allemande composée de tanks et autres engins blindés, va maintenant entrer en action.

--- trois colonnes foncent sur les trois entrées de l’arsenal :

--- une se présente à la porte Principale

--- une à la porte Castigneau

--- une passant par la pyrotechnie,dont l’entrée est située sur la route menant à La SEYNE prend  la direction de la porte du chemin de fer, cette dernière colonne étant la plus dangereuse, puisque dès lors qu’elle aura franchi cette porte, la plus à l’Ouest de l’arsenal, elle sera à proximité immédiate des appontements de Milhaud, où se trouvent toutes les grosses unités des Forces de Haute Mer: STRASBOURG, COLBERT, ALGERIE, MARSEILLAISE, c'est à dire 1 cuirassé, 3 croiseurs et 5 contre-torpilleurs : TIGRE, LYNX, PANTHERE, AIGLE et VAUBAN, toutes ces unités groupées sur un même appontement et en parfait état, quel avantage pour les ennemis Allemands.

A  CET  INSTANT  LA , LE  DESTIN  DE  NOTRE  FLOTTE  NE  TIENT  QU’A UN FIL…… ! C’EST  MAINTENANT  UNE  QUESTION  DE  MINUTES

Depuis qu’il a lancé son ordre de branle-bas, à 5 heures, de LABORDE campe sur ses positions ; qu’attend t-il ?

Il est SEUL avec sa conscience, coupé de tout le monde, et il doit prendre une terrible décision, inhumaine, effrayante, le sort du tiers en tonnage de la flotte française dépend précisément de cette décision, sans compter du sort de plusieurs milliers de marins qui vont se trouver en danger. Il le dira lui-même, à son procès après la guerre ; je voulais aller jusqu’à la dernière extrémité. Cette dernière extrémité est imminente.

A la Préfecture Maritime, à cet instant, le contact est maintenu avec VICHY. On tourne en rond. Messages incohérents , décousus, incompréhensibles. Jugez vous-même : POUR AMIRAUX DE LABORDE ET MARQUIS, DE LA PART PRESIDENT LAVAL/ EVITER TOUT INCIDENT – ensuite DE LA PART AMIRAL ABRIAL : CECI MODIFIE INTEGRALEMENT TOUS LES ORDRES ANTERIEUREMENT RECUS : EVITEZ DESTRUCTION DE MARERIEL  ( ! ) ARRETEZ LES FRAIS ( !) PAS DE COUPS DE FUSILS INUTILES – EVITEZ EFFUSION DE SANG – comment interpréter tout cela, sinon par NE VOUS SABORDEZ PAS ! dans tous les cas, ces ordres n’ont eu aucune influence sur les décisions du sabordage, les responsables de VICHY ayant sur la situation qui évoluait à la vitesse grand  V  une vision qu’ils appréciaient à leur façon, de leur bureau, alors que les amiraux qui, sur place devaient gérer la situation en jouant sur le chronomètre n’avaient à ce moment là que faire des messages qu’ils recevaient. Ce conciliabule téléphonique à sens unique allait durer jusqu’à 6h20 . C’est à cette heure là, que les liaisons téléphoniques VICHY-PREFECTURE MARITIME sont définitivement coupées par les Allemands. TOUT CONTACT AVEC VICHY QUANT A LA DECISION FINALE SERA DESORMAIS COUPE !  TOULON  NE  REPOND PLUS

LES  SOUS-MARINS  DU  MOURILLON

A ce stade là de l’opération, il est bon d’ouvrir une parenthèse sur le groupe dit de relève concernant les sous-marins basés au Mourillon.

Ils sont au nombre de 9. Parmi eux, 7 sont opérationnels : CASABIANCA , GLORIEUX, MARSOUIN, VENUS, IRIS, REDOUTABLE et DIAMANT. 2 autres, en gardiennage, POINCARE et PASCAL.

Ils n’ont pas eu à s’occuper de l’alerte, puisque ce sont les Allemands qui s’en sont chargés eux-mêmes. Leur commandant responsable du groupe Est, avait pour mission le Fort Lam algue,  l’arsenal du Morillon, qui se trouve à proximité, ensuite s’emparer des sous-marins et mettre en place d’une batterie destinée à contrôler la passe à la sortie du port, afin de faire échec à toute tentative d’appareillage de bâtiments.  

Deux détachements se dirigent sur l’arsenal dès 4h30, se mettent en place, et à 4h50, ce sont des troupes à pied, transportées au préalable par des véhicules, qui s’étaient avancées silencieusement, et qui attaquent donc la porte Nord de l’arsenal du Mourillon, avec pour objectif d’en obtenir l’ouverture devant permettre par la suite à leurs blindés d’y pénétrer. Mais cela ne se passe pas comme prévu ; le chef de poste, ne s’est pas laissé surprendre, et sans perdre une seconde, téléphone au capitaine de frégate BARY, qui commande le groupe des sous-marins. Ce dernier, au moment où les Allemands à pied allaient pénétrer sur le quai où sont accostés les sous-marins, donne de suite l’alerte au sifflet, tout simplement. Les assaillants ouvrent le feu, arrosant le quai par des tirs d’armes automatiques, afin d’empêcher une partie des équipages qui dort à proximité des sous-marins, de rallier leur bâtiment. Mais là, pour les sous-mariniers, cela dépasse les bornes, et pas décidés du tout à rester sans réaction, leur riposte est rapide, violente et efficace : les mitrailleuses des sous-marins entrent en action, fusils-mitrailleurs également, et certains allemands étaient même si près des submersibles, ou des locaux proches, qu’ils se font tirer dessus même à coups de révolvers. Plusieurs d’entre eux mortellement touchés s’effondre, et surpris par cette réaction à laquelle ils ne s’attendaient pas, on assiste de leur part à un repli général, et ils vont se mettre à l’abri. Cela permet aux sous-mariniers qui couchaient dans leurs dortoirs à terre, de regagner rapidement leur bord, certains même en pyjama.

Donc, à bord des sous-marins, il semble que le premier à avoir été alerté, a été le MARSOUIN, lancé en 1924. Vieux, certes, mais toujours en service. C’était l’un des premiers sous-marins de grande croisière de la série des 900 tonnes.

Peu avant 5 heures, Le lieutenant de vaisseau MINE, Commandant du MARSOUIN, qui n’était pas arrivé à fermer l’œil de toute la nuit, tout comme du reste les nuits précédentes, avait ouvert un livre et lisait ; lui aussi, comme les autres commandants des sous-marins, s’attendait à l’attaque Allemande, et il savait qu’elle allait avoir lieu, conscient de son imminence. De faction dans la baignoire , le kiosque, le quartier-maître NEDELEC, prévenu par les avertissements du capitaine de frégate BARY, se précipite sur la cabine du Commandant MINE et sans même frapper, ouvre la porte et et s’écrie : COMMANDANT, LES ALLEMANDS SONT LA, ON TIRE SUR LA STATION DES SOUS-MARINS .

MINE se lève d’un bond, passant de sa couchette dans sa coursive et lance d’une voix tonitruante : BRANLE-BAS DE COMBAT – POSTE D’APPAREILLAGE : il lui a suffi d’une fraction de seconde pour lancer cet ordre, c’était instinctif ; cela signifie que dans son esprit, le mot SABORDAGE n’existait pas !

Et pourtant, oui ….et pourtant, comme je l’ai déjà indiqué dans le chapitre OPERATION TORCH, le MARSOUIN était l’un des trois sous-marins rescapés d’Afrique du Nord lors de l’attaque anglo-américaine du 8 novembre, et qui avait réussi à s’échapper, après avoir été grenadé et avait pu regagner TOULON, le jour même de l’encerclement de la ville par les allemands !  pauvre commandant MINE ! il venait de tomber de CHARYBDE en SCYLLA.

C’est très sincèrement que je pense souvent à lui, et dans quel état d’esprit il devait se trouver à ce moment là. Il ne devait plus savoir à quel Saint se vouer ! réussir à échapper aux assaillants Américains , et maintenant, s’apprêter à les rallier, en faisant le chemin inverse,avec les mêmes dangers , et cependant, MINE n’hésite pas !

La perspective de l’évasion de TOULON, était partagée par l’ensemble des commandants des sous-marins du Mourillon., à bord desquels, pendant ce temps, on était déjà entrain d’exécuter un plan minutieusement préparé et répété au cours des jours précédents par plusieurs commandants.

Les sous-mariniers préparent l’appareillage à une vitesse qui ne leur permet pas de s’attarder dans les détails. Par exemple le GLORIEUX , relié à l’atelier par des câbles électriques et des tuyaux d’air comprimé, va larguer ses amarres , lancer ses moteurs et en s’écartant du quai, rompre tout simplement les câbles et les tuyaux.

A préciser qu’à ce moment là, pendant que les sous-marins manoeuvraient pour leur appareillage, les allemands, sans leurs blindés, occupaient les bâtiments situés à moins de 100 mètres d’eux, mais les équipages continuaient de couvrir leurs mouvements, par des tirs de mitrailleuses et armes automatiques.

Il avait été convenu, entre les commandants, qui avaient tout prévu depuis plusieurs jours, que le premier paré, foncera sur la panne qui bloque la sortie de la darse, ouvrant ainsi une brèche par où pourront s’engouffrer les autres, mais pour ce faire, il avait fallu que parmi les équipages, particulièrement ceux du pont, ils aient pu, ce qu’ils ont fait, rejoindre le bord avec révolver et casque ; autant que faire se peut, les mécaniciens et électriciens se sont précipités sur les câbles de charge et après les avoir débranchés en catastrophe, les ont balancés sur le quai.

Certes, la situation, dans cette précipitation était confuse, mais a force d’entraînements et de répétitions, chacun a réussi à regagner son poste, à l’exception du cuisinier du CASABIANCA , qui lui, n’a pas eu le temps de rejoindre son bord, m’a confirmé Charles BERNARD, et qui a été contraint de se passer de lui, l’équipage ayant dû faire sa cuisine lui-même jusqu’à ALGER. Les ordres fusaient : LARGUEZ TOUT ; je ne me lasserai jamais, de rendre hommage à tous ces sous-mariniers qui ont réussi à s’y retrouver en pleine nuit, chacun regagnant son poste, l’assurance, la lucidité, la clairvoyance, l’organisation, le flair, le métier des Commandants, des Officiers et de leurs équipages, oui, même aujourd’hui, je me demande comment ils ont fait pour réussir cet exploit, véritable acte héroïque, alors que les allemands n’étaient qu’à quelques dizaines de mètres d’eux..

En fait, si le premier alerté a été le MARSOUIN, c’est le CASABIANCA, (sans cuisinier) qui sera le premier paré. Le commandant L’HERMINIER écrira sur son livre de bord une phrase que je savoure, et qui me plaît énormément : NOUS ATTENDIONS UN ENNEMI, ET L’ENNEMI, DIEU SOIT LOUE, EST….ALLEMAND !

Sur ce même livre de bord, il mentionnera ce qui suit, et qui est un hommage rendu  sur la maestria avec laquelle l’appareillage s’est effectué :

---  4h55  Rien à signaler.                                                                                                                                   

---  5h05  Alerte au klaxon – Ennemi sur le quai – Ouvrons le feu.

---  5h10  Dépassons la VENUS.

Ces mentions sont le reflet de ce qui sera porté sur les livres de bord des autres sous-marins qui ont réussi l’évasion.                                                                                                                  

Revenons auprès du commandant Robert MINE, il rajoutera sur son document, qu’à bord du CASABIANCA , du MARSOUIN, de l’IRIS, du GLORIEUX et de la VENUS, le personnel avait immédiatement fait surface , les Officiers étant sortis de leurs cabines dévêtus, les officiers-mariniers ont sauté en bas de leurs couchettes et foncés aux postes d’équipage pour rassembler les hommes.

Dès lors, les sous-marins sont maintenant fin prêts pour leur évasion. Aussières larguées, ils appareillent. Ils sont cinq. Ce ne sont certes pas de grosses unités, mais surtout, ne les oublions pas, car pour réaliser ce qu’ils vont faire, il fallait que tous les hommes qui s’engageaient dans cette aventure périlleuse, soient doués d’une belle trempe. Il nous faut les citer :

  •  le CASABIANCA 1.500 tonnes, commandant, le capitaine de corvette Jean L’HERMINIER.
  • le   MARSOUIN   900   tonnes,  commandant, le lieutenant de vaisseau Robert MINE.
  • l’IRIS 630 tonnes Son Commandant, le Capitaine de Corvette COULOMB, n’ayant pu rallier le bord à temps, appareillera sous les ordres de son Second, le Lieutenant de Vaisseau Guillaume

DEGE ;

  • le  GLORIEUX 1.500 tonnes   commandant  Robert MEYNIER, seul sous-marinier français à avoir coulé un U boot de la Kriegsmarine, avant juin 1940. Le commandant Robert MEYNIER, lors de son appareillage, a tiré lui-même au révolver sur les allemands, qui s’approchaient de son bâtiment ; c’était vraiment du combat rapproché !
  • La VENUS   commandant Pierre CRESCENT, en tête du groupe, défonce la panne, barrage de madriers, tenu par des câbles et des filets, qui ferme la passe du Mourillon. Cette manœuvre avait été prévu, en accord avec les autres commandants.

Elle se situe à 5h10. Les sous-marins sont EN AVANT TOUTE. Objectif prochain, le franchissement du barrage de la grande jetée qui n’est pas loin du Mourillon. Si on calcule la distance entre les deux, la position des sous-marins, par rapport à toutes les autres unités de la flotte, était la plus proche de la grande jetée, c'est-à-dire de la porte de sortie. Le CASABIANCA en tête, franchit les deux jetées de la sortie du Mourillon ; La jetée Nord n’est même pas à l’intérieur de l’arsenal, c’est un lieu de promenade très fréquenté, donc libre d’accès, et LHERMINIER fera remarquer ce qui suit : Ces imbéciles d’allemands n’ont même pas pensé de l’occuper, auquel cas, ils pouvaient nous prendre sous le feu de leurs blindés, et toute fuite était impossible. C’est également ce qu’ont dû penser les Commandants des autres sous-marins qui suivent de près

Deux barrages restent à franchir :

Pour le premier, situé entre le Mourillon et Saint-Mandrier, quelques difficultés, mais çà passe. C’est moins facile pour le second, fermé par un filet anti-sous-marin. Un remorqueur, le DARDENNES est en attente à proximité, mais son Patron refuse d’ouvrir, prétendant qu’il n’a pas reçu d’ordres. ( En fait, il va y avoir deux versions différentes dans l’explication de cet incident entre le patron du remorqueur, FRANCESCHI, et le commandant LHERMINIER, deux versions qui ne concordent pas ; mais dans ces moments dramatiques, cela peut se concevoir) Les avions Allemands entrent en action et ayant repéré les submersibles avec leurs fusées éclairantes, commencent de larguer des mines. Ce n’est plus qu’une question de minutes. Menacé par un révolver, FRANCESCHI, le Patron du remorqueur s’empresse alors de faire ouvrir le barrage et le Commandant LHERMINIER, sentant le danger lance l’ordre de plongée, au klaxon : Tant pis, on plonge/ :en avant six ( vitesse maximum) En s’affalant dans le kiosque, il a le temps de voir droit devant l’extrémité de la jetée qu’il n’a pas encore franchie : A GAUCHE CINQ – QUINZE METRES – ASSIETTE ZERO .   Les mines vont sauter, mais il sera passé. Il est 5h35. Une demi-heure seulement après l’appareillage, le CASABIANCA est en plongée, ce qui fera dire à son Commandant : en 16 ans de carrière, je n’ai jamais vu une plongée aussi remarquable. Viennent les autres sous-marins, mais l’officier en second, le lieutenant de vaisseau  DEGE, de l’IRIS, voit CRESCENT, de la VENUS, mettre un youyou à l’eau, ayant visiblement l’intention de saborder son bâtiment en eau profonde ; c’est vraiment bête, pense t-il, avoir fait le plus dur, et détruire son bâtiment ; il offre à CRESCENT de le prendre à son bord. Il refuse, et se fait traiter de bande de cons, et poursuit sa route sans perdre de temps. CRESCENT avait tout de même ses raisons, et à la limite, on peut le comprendre ; nous l’expliquerons plus loin. Le MARSOUIN et le GLORIEUX en dernier, sont passés.

Cependant, au moment où le MARSOUIN passait la jetée, une violente explosion ; c’était le phare de cette jetée, qui venait d’être touché par une bombe, tuant quatre marins ; les premières victimes de la tragédie ; il avait été visé, car une mitrailleuse, voyant les mines tomber, avait ouvert le feu sur les avions de la Luftwaffe.

A bord du MARSOUIN, problèmes de réglages très sérieux concernant le compas gyroscopique,  fort heureusement solutionnés par le premier maître GOUBERT. MINE, se sent mieux , il a plongé lui aussi : 30 METRES – HALEZ BAS LE PERISCOPE  - ZERO A LA BARRE.  Sentant son vieux MARSOUIN en sécurité, il respire ; Ses nerfs sont sur le point de lâcher ; il demande à son Maître d’Hôtel, d’apporter quelques tasses de café dans le kiosque.

Lorsque le plateau arrive, sa vue seule suffit à rasséréner le Commandant du MARSOUIN ; le maître d’hôtel BROSSARD, un jeune, embarqué depuis peu, ayant tout vu, l’équipage faire son travail calmement, comme à l’exercice, n’a pas voulu être de reste. Il n’a même pas osé simplifier le service, notera MINE, et nous a apporté un plateau garni comme dans un salon de thé. Les toasts, les coquillettes de beurre et le napperon brodé reflètent le symbole du calme qui règne à bord.

Tout ceci démontre la qualité des équipages , merveilleuse qualité dont ils viennent de faire preuve et pourtant, certains n’avaient eu que peu d’occasions de s’entraîner depuis des mois, mais la perspective, de PASSER DE L’AUTRE COTE ET DE COMBATTRE LES ALLEMANDS, les avaient galvanisés. En fait, tous les marins présents à TOULON à ce moment là, piaffaient d’en découdre avec l’ennemi, y compris les anglophobes.

Mais voilà que tout en dégustant son café, MINE voit apparaître, ou plutôt réapparaître la petite chienne mascotte du bord ( race ratiers) , que l’on appelait LA MUSCLEE. Flairant le danger, elle s’était planquée au moment de l’appareillage mouvementé, et maintenant, le calme étant revenu, c’est elle qui refait surface, pour la grande joie de l’équipage. Alors, MINE, le commandant, prend la petite chienne dans ses bras, et la caresse !

Il me plaît de narrer, surtout aux jeunes générations, ces deux derniers passages de ma conférence, que je tiens, d’Henri NOGUERES , journaliste, avocat et historien auteur de l’ouvrage LE SUICIDE DE LA FLOTTE FRANCAISE A TOULON, excellent ouvrage qui contient de très nombreux détails sur cette tragédie. Il me plaît de les évoquer, car il démontre que ces hommes, d’une telle trempe, outre leurs qualités indiscutables en matière de métier de marins, de sang-froid devant le danger, de maîtrise dans une situation désespérée, et ce dans les moments où l’on  pourrait croire que tout est perdu, possèdent en plus des qualités de cœur ; j’ai voulu citer l’exemple de ce petit chien, car je sais qu’il fera plaisir aux amis des animaux, et ils sont nombreux, y compris dans la marine. Cela aussi, dans la vie, ce sont des toutes petites choses qui comptent, surtout dans les moments difficiles, et qui ont une grande importance.

Cruelle ironie du sort, le commandant MINE, lui qui avait fait le plus difficile, le plus dangereux en faussant compagnie aux Allemands à TOULON, devait trouver bêtement la mort le 26 juillet 1956, des suites d’une chute accidentelle survenu à bord de l’escorteur MAILLE-BREZE dont il avait le commandement. Pauvre commandant MINE….il ne méritait vraiment pas cela. Ayons toujours une pensée pour lui……… !    

Donc, deux sous-marins vont rallier ALGER : le CASABIANCA et le MARSOUIN, après avoir attendu 24 heures en plongée devant TOULON, attendant de prêter éventuellement main forte à des bâtiments de surface qui auraient réussi à s’échapper. Héla, ce ne fut pas le cas.

Charles BERNARD m’a expliqué de quelle manière le CASABIANCA, à l’inverse de l’IRIS et du GLORIEUX, avait pu se constituer une réserve de carburant lui permettant de rallier ALGER sans se réapprovisionner en cours de route. La commission d’armistice, afin que ces bâtiments ne puissent pas avoir les moyens de rejoindre les alliés, ne leur accordait qu’un quota de carburant pour assurer la sécurité côtière lors de leurs sorties. Mais il se trouve qu’à chacune de ces sorties, le sous-marin, même en surface, ne se propulsait qu’avec ses moteurs électriques, et non pas avec les diesels. Avant de rentrer à TOULON, au retour de chacune de ses missions, le commandant faisait le calcul de ce qu’il aurait pu consommer ainsi en navigant en surface, et transférait dans une autre soute, la quantité estimée de ce carburant, et se constituait ainsi une RESERVE, qui échappait au contrôle des vérifications effectuées par la commission d’armistice.

Ce problème ne se posa pas pour le MARSOUIN, qui lui, venant de rentrer d’Afrique du Nord, avait une réserve de carburant suffisante.

Le GLORIEUX en matière de sortie de TOULON fera de même, puis mettra le cap sur BARCELONE et infléchira ensuite sa route sur VALENCE, où il arrivera le 30 novembre. Il se réapprovisionnera en carburant, et l’accueil glacial qui lui a été réservé par les Espagnols, va l’inciter à ne pas s’attarder et à repartir en direction d’ORAN, qui était pour lui le port le plus proche.

LE CAS PARTICULIER DE l’IRIS

Le Commandant en second DEGE, qui avait pris sur lui l’initiative de l’appareillage, se vit confronté à plusieurs difficultés. D’abord, il n’était pas le Commandant en titre, et semblait ne pas savoir quelle solution adopter, soit se laisser interner en Espagne, à BARCELONE, port où il avait fait route après son départ de TOULON, mais où il ne pouvait pas rester plus de 48heures, étant dans un pays neutre sans y être interné passé ce délai, soit étant à court de carburant, se réapprovisionner et faire route comme les autres sur l’Afrique du Nord. Toujours est-il qu’il se vit refuser d’être réapprovisionné en carburant, personne, parmi les autorités diplomatiques britanniques, ne voulant régler le montant de la facture, ce qui n’avait pas été le cas pour le GLORIEUX à VALENCE. Par ailleurs, et ceci n’est pas officiel, mais j’ai tout de même entendu à ce sujet certains échos : Pierre PUCHEU, qui avait été Secrétaire puis Ministre de l’Intérieur de PETAIN, sous les gouvernement, de DARLAN et de LAVAL, membre depuis 1939 du Parti Populaire Français de Jacques DORIOT, à caractère néo-nazi s’était illustré par sa répression contre les mouvements clandestins, les gaullistes, les juifs, les communistes et les franc-maçons, se trouvait à BARCELONE en même temps que l’IRIS. Même les allemands étaient extrêmement surpris par le zèle, la hargne qu’il mettait à prévenir leurs désirs dans cette lutte qu’il menait contre les mouvements de résistance quand il était en fonction. C’est du reste lui qui était à l’origine de l’arrêté instaurant la FRANCISQUE comme insigne officiel des partisans de VICHY. Ses intentions étaient même de succéder un jour à PETAIN… ! rien que çà… ! Il faisait de l’ombre à son gouvernement, ce qui lui valut d’être mis en disgrâce en avril 1942, et donc sur la touche. Dès le débarquement anglo-américain en Afrique du Nord, le 8 novembre de cette même année, il s’enfuit en Espagne clandestinement, avec l’intention de rejoindre les Alliés, ayant pris conscience que les allemands avaient perdu l’avantage. Il passa d’abord par BARCELONE, où il séjourna quelques temps, ce qui lui permit de contacter GIRAUD, qui lui conseilla de rallier le Maroc, via le Portugal, afin d’être intégré dans l’armée française libératrice.  

Ayant appris la présence de l’IRIS à BARCELONE, il aurait contacté DEGE afin de lui demander de le prendre avec lui, et d’appareiller pour ALGER, ce qui lui aurait permis d’arriver  en Afrique du Nord avec les honneurs. Cette suggestion ne faisant qu’ajouter au trouble de DEGE, qui ne tenait pas à se mouiller dans ces affaires politiques, outre le fait qu’il n’arrivait pas à solutionner ses propres problèmes ne disposant pour ce faire, que d’un délai de 48 heures, préféra abandonner la partie et se laisser interner en Espagne, ce qui, à mon avis devait lui apparaître comme étant un moindre mal.

Une chose ne sera jamais élucidée : la décision des britanniques de ne pas vouloir assumer les frais du réapprovisionnement en carburant du submersible,  était-elle liée au fait du passage éventuel de PUCHEU pour l’Afrique du Nord par l’intermédiaire du sous-marin IRIS ? Je l’ignore, et dans tous les cas, il me plairait que l’on puisse infirmer cette information, ou même et surtout la confirmer, mais là, comme pour beaucoup d’autres évènements qui se sont produits au cours de l’histoire de la seconde guerre mondiale, nous ne le saurons jamais, géopolitique à l’échelon international oblige….. ! pour ma part, mon intime conviction me dit que PUCHEU, a bien contacté DEGE, afin qu’il le prenne à son bord  pour rejoindre l’Afrique du Nord, d’où le refus des Anglais de vouloir payer le règlement du réapprovisionnement en carburant. Comment aurait-il pu en être autrement, les deux hommes étant à BARCELONE en même temps…. !

Bref, - l’affaire- n’ayant pas pu se conclure, finalement, PUCHEU rejoignit CASABLANCA via le Portugal en 1943, mais fut arrêté par la suite à ALGER, aussitôt, désavoué par GIRAUD ( qui lui avait conseillé de venir le rejoindre ! ) et par de GAULLE , puis traduit devant un tribunal militaire, il fut condamné à mort, et exécuté à Hussein Dey le 20 mars 1944.

Avant de mourir, il bénéficia d’une faveur : l’autorisation de se faire présenter l’Adjudant qui commandait les militaires chargés de la sentence, lui serrer la main tout comme celle des hommes qui allaient le fusiller, et de commander lui-même le peloton d’exécution. Ce qu’il fit, en s’écriant VIVE LA FRANCE. 

Il n’aura ainsi réussi qu’une chose dans sa vie : SA MORT....!

Pour clôturer cet épisode concernant les sous-marins, il y a lieu de signaler, mais le fait que je vais citer, n’a jamais été confirmé par personne,  je le mets au conditionnel , car je n’en ai eu connaissance qu’à travers des témoignages verbaux à travers le désordre qui régnait dans l’arsenal au moment de cette situation, qu’un sixième sous-marin aurait tenté de sortir,et il s’agirait du DIAMANT, poseur de mines. Il aurait effectivement appareillé, mais pour une cause indéterminée, il pourrait s’agir d’un problème de machines, il aurait rebroussé chemin à 200 ou 300 mètres après avoir quitté le quai, pour rejoindre ensuite son point de départ.

 Post-Sriptum

J’ignorais le cas de Pierre FAVREAU, que je m’empresse de rajouter dans mes notes sur l’épisode des sous-marins de Toulon, dont j’ai été le témoin ce vendredi 27 novembre 1942. Il est d’autant plus intéressant, que l’intéressé préalablement au CASABIANCA, était embarqué à bord du GLORIEUX et que lui aussi a réussi à s’évader de Toulon et s’est dirigé sur Oran.

Je voudrais apporter une précision concernant le cas de CRESCENT , Commandant le VENUS , qui a sabordé son bâtiment en eau profonde à la sortie de la jetée, refusant de rallier les anglo-américains débarqués en Afrique du Nord.

On peut le comprendre. N’oublions pas que le 3 juillet 1940, alors qu’il se trouvait à bord du SURCOUF, qui avait déjà rallié l’Angleterre, ce jour là étant, comme chacun sait, le jour de l’opération CATAPULT, les fusiliers-marins anglais ont occupé par la force le sous-marin, cela s’est mal passé, un bref mais violent accrochage a eu lieu à bord, il a fait trois morts, dont un officier camarade de CRESCENT qui a été tué devant lui par un anglais, tué à l’arme blanche, à savoir « à la baïonnette ». Ecoeuré par cet horrible spectacle, qui, ne l’oublions pas, s’est déroulé moins d’un mois après la fin de l’Opération DYNAMO, au cours de laquelle 16000 soldat Français avaient trouvé la mort à Dunkerque, ( sans compter les 3000 civils) CRESCENT s’est refusé à poursuivre la guerre y compris dans les FNFL et a rejoint la Marine de Vichy à Toulon.

On peut....... le comprendre............ !

 

Par ailleurs, n’oublions pas de quelle manière a été traité l’équipage du Contre-Torpilleur LEOPARD, qui avait rallié l’Angleterre début juillet 1940, et dont l’équipage a été retenu « prisonnier » jusqu’au 6 décembre de la même année......un comble.... 

Dans tous les cas, bravo et merci à notre ami Jean-Luc DELAETER, qui ne manque pas de nous rappeler ces périodes douloureuses historiques de ce second conflit mondial, et bien d’autres, ce qui nous permet chaque fois, de pratiquer ce rappel de mémoire, dont nous avons tant besoin, et qu’il serait bon de rappeler dans les établissements scolaires, ce qui hélas, ne me semble pas être le cas    ........ !

Je me dirige maintenant vers mes 88 ans...... ! J’ai franchi l’automne de ma vie. Comme aurait dit BIGEARD, ( avec lequel j’étais en contact au sujet de l’Indochine) à mon âge, je pourrais « m’en fiche », mais « je ne m’en ficherai pas », au nom de ceux qui sont tombés, morts pour la France, qui ont tout donné, sans rien demander en échange, de toutes les armes, avec un accent particulier pour la Marine, passion de toute mon existence, et naturellement......les sous-mariniers.

Pourquoi j’insiste sur ce point là ? C’est parce que le jour où pour moi.......le rideau va tomber, moment que j’attends avec beaucoup de sérénité, j’aurai alors un regret, un grand regret, c’est de n’avoir pu être.......sous-marinier........mais, les pages se tournent et.......on ne peut pas refaire sa vie.......... ! 

 

N’oublions jamais que :

« L’Histoire, c’est la reconstruction du passé »

Et que

« La Mémoire, c’est l’organisation des silences et des oublis... »

 

Yves SANCHE

 

Les commentaires

Ecrit par DAYAN Lucien
le 2015-02-23 à 09:09:04

Affaire PUCHEU, il a été fusillé au polygone de tir du "Caroubier" de la commune d'HUSSEIN-DEY dont je suis natif il y avait là aussi l'Hippodromes où se couraient de temps en temps des Courses de chevaux...ce terrain était limitrophe de MAISON-CARRE. C'est aussi là que le jeune BONNIER DE LA CHAPELLE qui avait exécuté DARLAND a été fusillé.

Ecrit par jose Vasseur
le 2015-02-23 à 07:41:44

Comme toujours un travail excellent;

Merci et Bravo Jean Luc.